Les industries créatives et culturelles africaines attirent enfin les financements

(Agence Ecofin) – Pendant plusieurs années, peu d’institutions financières africaines ont investi dans les industries culturelles et créatives. La situation s’est inversée ces derniers mois avec des annonces de financement de certaines des banques et organisations les plus importantes du continent et du monde.

En 2021, dans une interview, Alain Modot, le fondateur du distributeur Diffa se plaignait du manque de financement de l’audiovisuel et du cinéma en Afrique. « Le secteur banquier africain ne sait pas ce que c’est que l’audiovisuel et les banques refusent de financer les projets audiovisuels. Elles ne considèrent pas la production au même titre que les autres entreprises. Vous n’obtenez pas de prêts pour un tournage, même garanti par un contrat de l’Etat ou un contrat d’une grande société », se désolait-il à l’époque. Environ 3 ans plus tard, les choses sont sur le point de changer et les industries créatives et culturelles semblent désormais avoir le soutien des banques et des institutions financières en Afrique.

 Des annonces tous azimuts

Le 18 octobre, la Banque africaine d’import-export (Afreximbank) a annoncé, une augmentation de son soutien financier aux industries créatives et culturelles sur le continent. Initialement de 1 milliard $, le fonds, dédié aux financements du cinéma, de la mode, de la littérature, de la musique et des autres secteurs des industries créatives et culturelles, doublera pour atteindre 2 milliards $ annuels durant les 3 prochaines années. « Comme pour beaucoup de choses en Afrique, les opportunités dans les industries créatives abondent, mais restent inexploitées. C’est pourquoi Afreximbank a adopté une approche proactive pour catalyser l’industrie. Aujourd’hui, j’ai le plaisir d’annoncer un doublement de notre financement du secteur, qui passera à 2 milliards de dollars pour les trois prochaines années », a confirmé Benedict Oramah.

Rarissimes il y a quelques années, les annonces de soutien financier pour les industries créatives et culturelles sont devenues fréquentes. En septembre dernier, Heva Fund, un groupe d’investissements dans les industries créatives et Next Narrative Africa, une société de production de divertissement, ont annoncé vouloir mettre en place un financement de 40 millions $ pour financer les industries créatives durant les 4 prochaines années.

D’après l’annonce, le fonds permettra d’investir dans des projets audiovisuels et cinématographiques « à fort impact sur le continent » et susceptibles de changer le narratif sur l’Afrique. Il y a un an, la Société financière internationale (SFI) et Sony ont annoncé un fonds de 10 millions $ dédié aux start-ups africaines impliquées dans les industries créatives. « Grâce aux activités du Sony Innovation Fund Africa, nous espérons accélérer la croissance de l’industrie du divertissement en Afrique et contribuer au progrès et au développement de la région en offrant des opportunités de collaboration avec les entreprises de divertissement du groupe », avait expliqué Toshimoto Mitomo, vice-président exécutif et directeur de l’exploitation de Sony. Quelques mois avant, Proparco, filiale du groupe Agence française de développement, a lancé CREA Fund, une initiative destinée à faciliter l’accès au financement des industries culturelles et créatives en Afrique subsaharienne.

Les gouvernements encore attendus

Si les choses changent et que davantage d’investissements sont annoncés pour les industries créatives, on note une plus grande implication des acteurs privés. En revanche, du côté des gouvernements, les choses n’ont pas énormément changé depuis 2022. Cette année-là, un rapport de l’Unesco a par exemple révélé que seuls 19 des pays africains sur 54 proposent un soutien financier aux réalisateurs de cinéma. Le 11 octobre, le Bénin a annoncé la création d’un Fonds de développement des Arts et de la Culture. La Direction générale de l’Agence de Développement des Arts et de la Culture (ADAC) a lancé le premier appel à projets permettant de bénéficier du fonds le 14 septembre.

Les pays investissant dans plusieurs domaines des industries créatives et culturelles ne sont pas nombreux en Afrique. Des pays comme le Nigeria et le Ghana ont investi ces dernières années dans le développement et la promotion de leurs productions cinématographiques locales mais le cinéma n’est pas le seul secteur des industries créatives et culturelles. La plupart des pays africains évoquent souvent des velléités d’accompagnement de leurs industries culturelles et créatives mais se concentrent souvent sur des secteurs évidents comme la musique et le cinéma, négligeant parfois la mode, la littérature ou encore les jeux vidéo ou les nouveaux créateurs de contenus.

Une fois le problème de financement réglé, les industries culturelles africaines pourront s’attaquer à l’autre grand problème des services et produits du secteur : leur distribution.

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